Figure 1 : Jean-Baptiste Boussingault (1802-1887)
Au XIXe siècle, la théorie miasmatique des maladies contagieuses et infectieuses devient réaliste, de nominaliste qu’elle était jusqu’alors : les miasmes ne sont plus un nom générique de toutes les nuisances susceptibles d’affecter les organismes, ils deviennent une inconnue, que l’analyse chimique, récemment mise sur de nouveaux rails, doit déterminer. Cet article de Boussingault fut considéré par ses contemporains comme le texte de référence sur la question, avant que la théorie des germes ne vienne élucider la question de la nature des miasmes.
Son auteur, Jean-Baptiste Boussingault, appartient à la troisième génération de chimistes contemporains, celle des élèves des élèves de Lavoisier et ses proches collaborateurs, Fourcroy, Berthollet et Guyton de Morveau. Et c’est le plus fidèle à Lavoisier de tous : son instrument privilégié reste la balance, toute réaction chimique étant affaire de poids avant et après ; sa ferme expérimentale de Bechelbronn (Alsace) émula celle de Lavoisier à Fréchines (près de Blois). Boussingault fut l’instituteur de l’agronomie chimique en France tout comme Liebig en Allemagne.
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Dans le cadre de la nouvelle chimie, la théorie des miasmes disposait d’un modèle, celui des marais dont les émanations donnaient des « fièvres intermittentes », ce qu’on appelle aujourd’hui le paludisme et qu’on savait déjà soigner avec la quinine
(1). Lavoisier avait en effet proposé de considérer les maladies comme des fermentations putrides. C’était un type de fermentation au cours de laquelle tous les éléments constitutifs se dégageraient sous forme de gaz. S’il s’agit de matière végétale, l’hydrogène contenu se dissiperait sous forme de gaz hydrogène, l’oxygène et le carbone sous forme de gaz carbonique, pour ne plus laisser que de la terre ; s’il s’agit de matière animale ou végétale qui contient de l’azote, celui-ci se combinerait avec l’hydrogène pour donner de l’ammoniaque. La fermentation putride
se développe là où la matière morte est exposée à l’action de la chaleur et de l’humidité
Cette condition est naturellement remplie par les marais.
À cette cause générale, admise par tout le monde, Boussingault en ajoute deux autres. L’une est le défrichement :
les arbres qui tombent sous la hache du planteur exhalent, en se décomposant, les miasmes les plus délétères. (…) Le mal dura tout le temps que les racines et les souches des arbres abattus et brûlés en partie mirent à se réduire en terreau.
L’autre en est le mélange des eaux douces et salées :
Son action se manifeste surtout d’une manière terrible là où il se fait un mélange d’eaux douces et d’eaux salées, à l’embouchure des grands fleuves, ou sur le littoral des golfes qui reçoivent de nombreux torrents. (…) C’est surtout dans les localités où les eaux de la mer peuvent se mêler aux eaux douces et stagnantes que les effets délétères sont les plus tranchés.
Et il cite, à ce propos, le mémoire de Gaetano Giorgini « Sur les causes de l’insalubrité dans le voisinage des marais en communication avec la mer », publié dans les mêmes Annales de Chimie et de Physique neuf ans plus tôt (2). Il lui emprunte d’ailleurs sa référence à Vitruve qui « recommandait de ne pas établir une ville dans de semblables circonstances. » Gaetano Giorgini écrivait en effet que
Vitruve, dans son Architecture, livre 1er, chapitre IV, conseille de ne point bâtir une ville dans le voisinage d’un marais toutes les fois que, son niveau n’étant pas plus élevé que celui de la mer, les eaux salées introduites pendant la tempête ou la marée n’ont plus d’écoulement dès qu’elles ont cessé.
Figure 2 : Gaetano Giorgini (1795-1874)
Gaetano Giorgini, issu d’une famille noble de Lucques, page d’une princesse qu’il avait accompagnée à la cour de Napoléon, entra major à Polytechnique en 1812. Il revint en Italie à la Restauration et devint directeur des eaux du Grand Duché de Toscane en 1818. Dans cet article, il décrivait les expériences de séparation des eaux douces et des eaux salées par un système de vannes qui se fermaient avec le flux des eaux de la mer pour leur faire barrage et s’ouvraient avec leur reflux pour laisser s’échapper les eaux fluviales. Mis en place au siècle précédent, ce système de séparation des eaux aurait éliminé les fièvres paludéennes qui réapparaîtraient dès qu’il était endommagé faute d’entretien, constituant de la sorte une expérience positive et négative tout à la fois.
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Boussingault s’est intéressé aux miasmes pour deux raisons. La première, c’est que, traversant l’Ain en revenant à pied vers Paris de Saint-Étienne où il avait intégré l’École des Mines, il avait
vécu au milieu de ces populations languissantes chez lesquelles la vieillesse est, pour ainsi dire, inconnue.
Dans ses Mémoires, il rapporte en effet :
Je pris par Bourg, le pays du chanvre, et je fus frappé de la mauvaise mine des paysans, on ne voyait que fiévreux, atteints de fièvres paludéennes, que l’on attribuait aux émanations miasmatiques de la contrée et surtout à celles provenant du rouissage. C’est en traversant ce pays malsain que je conçus, pour l’exécuter plus tard, dans des contrées encore plus éprouvées par ces maladies, le projet de rechercher les miasmes dans l’atmosphère
(3).
La seconde raison, c’est que lui-même avait ressenti
les funestes effets du mauvais air [c’est ainsi qu’en Italien on appelait l’air des marais], pour se former une idée de la subtilité de ce principe.
Il avait commencé ses recherches sur les miasmes dans les chanvrières de l’Ain où il avait observé que l’acide sulfurique noircissait rapidement à proximité d’une mare à rouissage, mais lentement « loin du centre de putréfaction » (p. 156). Il les avait poursuivies en Amérique du Sud. À sa sortie de l’École des Mines de Saint-Étienne, il avait en effet été recruté par le gouvernement de Simon Bolivar pour créer et diriger une École des Mines à Bogota. Humboldt, ayant eu vent du projet, lui confia un ensemble de missions scientifiques qu’il n’avait pas pu mener lui-même à bien lors de ses propres expéditions. La carte 1 retrace les pérégrinations de Boussingault en Grande Colombie qui regroupait alors, autour de la Colombie actuelle, l’Équateur, Panama et le Venezuela.
Carte 1 : Expéditions de Boussingault en Amérique du Sud (1822-1832) (D’après Frederick W. J. McCosh, Boussingault. Chemist and Agriculturist, Reidel, 1984)
La carte 2 situe les lieux où Boussingault a fait des observations sur les milieux paludéens : dans le Choco, sur la côte occidentale, à la frontière de Panama ; à Guaillabamba et à Salinas de Mira, dans la province de Quito ; dans les steppes de San-Martin à l’est de Bogota, dans le département de Meta ; dans le « beau village d’Amaga », département d’Antioquia ; dans les marécages de Chagres, à Panama ; au fond du golfe de Maracaïbo, à l’entrée du lac éponyme au Venezuela ; dans les marais de Santa Marta, ville côtière du département de Magdalena, dont la Sierra Nevada, source de 36 rivières recouverte de marais et de tourbières, est le plus haut massif côtier du monde, isolé de la Cordillère des Andes, il culmine à plus de 5000m ; dans les llanos — plaine herbeuse sans arbre — du Meta, affluent de l’Orénoque ; à Caitia, ville côtière de la mer des caraïbes proche de Caracas ; dans les « vallées si malsaines de Patia et du Cauca », au sud de la cordillère occidentale, la vallée de Cauca constituant un département de la Colombie actuelle, la vallée de Patia se trouvant dans le département de Cauca plus méridional ; ou encore dans « le joli village de Turbaco », au nord du département de Bolivar, à 40 km de Carthagène, ce port de la mer des Caraïbes où sévit la fièvre jaune, ce que confirme un contemporain :
C'est un séjour malsain, où la fièvre jaune exerce souvent d'affreux ravages ; mais, pendant les grandes chaleurs, les étrangers et les principaux habitants se retirent à Turbaco, village indien, éloigné seulement de quelques lieues
(4)
De toutes ces observations, les unes personnelles recueillies au cours de ses expéditions, les autres relevées au fil de ses lectures, Boussingault conclut :
De tous ces faits qui sont bien constatés, et dont je pourrais citer un bon nombre, on a conclu que la matière organique végétale, en se décomposant sous l’influence d’une forte chaleur et d’une humidité constante produisait des miasmes.
Carte 2 : Une partie de la vice-royauté espagnole de Nouvelle-Grenade. Cette province a regroupé, de 1720 à 1820 environ, les territoires actuels de Colombie, Venezuela, Panama, Équateur (plus au sud, non représenté ici) : on a signalé par des flèches noires les capitales actuelles Bogota (Colombie) et Caracas (Venezuela). Certains lieux d’observations et d’expériences de Boussingault ont été figurés : à gauche, en rouge, le département et la vallée du rio Cauca, avec les villes (du S au N) de Cartago, Supia (mines) et Amaga ; en haut, en orange, la ville de Cartagène, le « joli village indien » de Turbaco (carré), les marais de Santa Marta ; à droite, en bleu, le lac de Valencia (ou de Maracay), à l’ouest de Caracas, et le fond du golf de Maracaïbo.
Sont aussi portés sur cette carte les lieux où Boussingault a fait ses expériences : « à Maracay, sur les bords du lac de Taricagua » (p. 156-157) (ou Tacarigua ou lac de Valencia), Maracay et Valencia bordant ce lac respectivement sur sa rive occidentale dans l’État d’Aragua et sur sa rive orientale dans l’État frontalier de Carabobo au Venezuela ; à Cartago, « à l’extrémité nord » de la vallée du Cauca (p. 157), où « [il ressentit sur lui-même] l’effet de miasmes dont [il cherchait] à constater la présence ; [il fut] atteint d’une fièvre qui [le] força d’interrompre [ses] recherches » (p. 159). Il les reprit « à la Vega de Zupia » (ou Vega de Supia, dans le département de Caldas), dont, à la fin de son contrat avec le gouvernement colombien il dirigea les mines d’or et d’argent.
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Les expériences de Boussingault furent de deux types, les unes traditionnelles, les autres plus novatrices. Les premières portaient sur la rosée sensée contenir les miasmes dans les conditions naturelles décrites p. 150 et 154 :
À Guaillabamba, à Salinas de Mira, lieux situés dans la province de Quito, les fièvres intermittentes, qui y règnent si fréquemment, sont attribuées uniquement à la grande différence qui existe entre la température du jour et celle de la nuit. (…) Dans les marais Pontins, comme dans ceux de la Caroline du Sud, on prévient les voyageurs de ne pas s’exposer à la rosée qui se dépose immédiatement après le coucher du soleil. (…) on a admis que les miasmes se déposaient en partie avec la rosée qui, dans les pays chauds et humides, se forme avec abondance immédiatement après le coucher du soleil. Aussi, l’idée de miasme a-t-elle toujours été liée à celle de la formation de la rosée.
Boussingault cite Pietro Moscati et Louis-Michel Rigaud de l’Isle (p. 155), mais le pharmacien Charles-Louis Cadet, qui est vraisemblablement sa source, fait remonter ces expériences à Thenard et Dupuytren qui
ont agité de l’eau distillée avec du gaz hydrogène carboné tiré de substances minérales : cette eau, laissée à l’air et en repos, ne s’est pas troublée, et peu à peu s’est dépouillée de son gaz hydrogène sans se corrompre. La même expérience, faite avec du gaz hydrogène carboné provenant de la putréfaction animale, a offert un autre résultat. L’eau s’est troublée, il s’y est formé des flocons d’une matière vraiment animale qui s’est précipitée par le repos, et le liquide s’est putréfié. Ainsi, quoique le gaz fût le même aux yeux du physicien, le dernier contenait manifestement des miasmes qui donnèrent naissance aux flocons observés et à la putréfaction de l’eau
(5).
Ces flocons seront la signature des miasmes dans toute cette série d’expériences où la rosée des marais remplacera l’eau distillée. Cadet poursuit avec les expériences de Moscati, et Boussingault le reprendra littéralement.
M. Moscati, célèbre médecin italien, a fait des expériences analogues qui ne sont pas moins curieuses. Ayant observé que la récolte du riz, dans les rizières humides de la Toscane, donnaient tous les ans lieu d’observer des maladies épidémiques, des fièvres adynamiques [fièvres typhoïdes], etc., il conçut le désir de connaître la nature des vapeurs qui s’élevaient de la terre, dans les marais où l’on cultive le riz. Il suspendit, à quelques distances du sol, des sphères creuses remplies de glace. Les vapeurs vinrent se condenser sur les sphères sous la forme de givre : il recueillit cette matière dans des flacons où elle se fondit et présenta d’abord un liquide clair. Bientôt il se remplit de petits flocons qui, réunis et analysés, offrirent tous les caractères d’une matière animale. Le liquide, au bout de quelque temps, se putréfia. M. Moscati fit le même essai dans un hôpital, en suspendant les sphères de glace au-dessus de plusieurs malades ; mêmes phénomènes, même résultat
(6).
Pietro Moscati (1739-1824), médecin et professeur d’anatomie et de clinique médicale à Milan et à Pavie, « eut le premier l’idée de condenser l’eau dissoute dans l’atmosphère » (p. 153) en appliquant à ce problème le principe de l’hygromètre de l’Académie del Cimento.
Figure 3 : Hygromètre de l’Accademia del Cemento (figure extraite des Saggi di Naturali Esperienze fatte nell’ Accademia del Cimento, publiés à Florence en 1666, p. XIII). Cet instrument se compose d’un cône inversé rempli de glace, de sorte que la vapeur d’eau ambiante vienne se condenser sur ses parois et s’égoutter au-dessous dans une flasque graduée, la quantité d’eau recueillie dans un temps donné mesurant le degré d’humidité.
Boussingault cite un autre hygromètre, celui de Saussure (p. 149), fondé sur un principe très différent. Ce n’est plus un hygromètre à condensation, mais à cheveu. Il est fondé sur la propriété qu’a le cheveu de s’allonger quand il est humide et de rétrécir quand il est sec, d’environ 25 millièmes de sa longueur. Le principe consiste à fixer une extrémité du cheveu, puis à l’enrouler autour d’un cylindre entraîné par un contrepoids, de sorte à le tendre sans l’allonger, et muni d’une aiguille qui parcourt un limbe métallique.
Figure 4 : Hygromètre de Saussure, où le cheveu est représenté par la ligne ab (le point a est situé sous le centre de la roue de mesure, le point b est situé en bas au centre du socle) (extraite des Essais sur l’hygrométrie, publiés par Horace- Bénédict de Saussure à Neuchâtel en 1783).
Louis-Michel Rigaud de l’Isle (v.1769-1826), qui « entreprit, dans les marais du Languedoc, une série d’essais dirigés dans le même sens » (p. 155), fut officier des armées révolutionnaires, conseiller général de la Drôme puis député de l’Empire. Envoyé à Rome pour étudier le dessèchement des marais pontins, ses Recherches sur le mauvais air et ses effets furent publiées à titre posthume en 1832. Son instrument, quoique recherchant le même effet de condensation, était bien différent. Il s’agissait de carreaux de verre à vitre disposés en losange sur un cadre incliné et dont les extrémités se recouvrent de sorte que la rosée s’y condense et ruisselle sur les deux faces vers un flacon à entonnoir. Il obtint lui aussi cette substance floconneuse, « dont il chercha à établir par des expériences faites sur les animaux l’action délétère » (p. 155), avec des résultats contrastés.
Boussingault refait donc cette expérience pour son propre compte, en exposant l’air des rouissoirs ou des marais à de l’acide sulfurique qui, d’une part, capte la vapeur d’eau, et, d’autre part, carbonise les matières animales ou végétales en suspension dans l’air. Il raffine son procédé lorsqu’il se rend compte que ces matières carbonisées ne sont autres que des moustiques dont on découvrira à la fin du siècle que ce sont les véritables vecteurs du paludisme. Son nouveau dispositif consiste en deux verres de montres, l’un chauffé, qui ne peut pas condenser la vapeur d’eau, tandis que l’autre, refroidi par l’abaissement de la température nocturne, se recouvre de rosée. Puis il ajoute « une goutte d’acide sulfurique distillé dans chaque verre » (p. 158) qu’il évapore à la chaleur d’une lampe. Il observe alors
une trace de matière charbonneuse adhérente au verre dans lequel la rosée s’était déposée, tandis que le verre qui n’en avait point reçu était parfaitement net après la volatilisation de l’acide.
Ce dispositif lui semble préférable parce que les moustiques peuvent être ôtés des verres avant d’y verser l’acide.
Si ces expériences prouvaient qu’une matière organique floconneuse de nature azotée se déposait bien après l’évaporation de la rosée comme ses prédécesseurs l’avaient mis en évidence, il voulut aller plus loin et la peser, comme l’eût fait Lavoisier :
En admettant a priori que le miasme contient, comme toute matière organique, l’hydrogène au nombre de ses éléments, je conçus l’idée, non seulement d’en accuser la présence dans l’air, mais encore de le doser jusqu’à un certain point en déterminant le poids de l’hydrogène qui pouvait entrer dans sa composition.
L’excès de poids de l’hydrogène dans l’air malsain par rapport à la normale pourrait être attribué aux miasmes organiques dont il serait l’un des composants. Pour cela, Boussingault monte un nouveau dispositif expérimental (figure 5) : l’air chargé de miasmes entre dans le tube e rempli de chlorure de sodium ou d’acide sulfurique qui le dessèchent, puis pénètre à travers un tube de caoutchouc i dans le tube f rempli de tournure de cuivre chauffé au rouge de sorte que le miasme brûle et son hydrogène forme de la vapeur d’eau qui se condense dans le tube g contenant du chlorure de calcium, et :
En pesant ce tube avant et après l’opération, on avait la quantité d’eau qui s’était formée, et partant la quantité d’hydrogène qui avait concouru à sa formation.
Figure 5 : dispositif de pesage de l’hydrogène conçu par Boussingault (figure adaptée de la seconde partie de son mémoire, consacrée à la détermination de l’hydrogène contenu dans l’air).
Toutefois, les pesées de Boussingault ne furent pas concluantes : parfois il obtenait une augmentation de poids, et parfois non (p. 160). Néanmoins, une expérience bien construite ne restant jamais stérile, c’est ce dispositif expérimental qui lui servit à déterminer avec Jean-Baptiste Dumas la véritable composition de l’air atmosphérique en 1841, prélude à une reprise de ses expériences sur l’air miasmatique, mais que la révolution pasteurienne rendra triviales.
En effet, John Tyndall observa qu’un rayon lumineux traversant une pièce obscure était réfléchi par les myriades de particules en suspension dans l’air, qui en révélaient ainsi la trajectoire. Cherchant à les éliminer, il fit passer l’air ambiant dans un tube contenant de l’acide sulfurique. Certaines particules subsistant parce qu’elles étaient au centre d’amas et donc échappaient au contact de l’acide, il parvint à les détruire complètement en brûlant l’air à la flamme. Il en conclut que, parmi ces particules organiques, devaient se trouver les germes dont Pasteur venait d’établir l’existence dans la fermentation et dans certaines maladies végétales et animales. Et il fit adopter le port du masque respiratoire pour éviter la contagion.
Les miasmes, qu’on pouvait observer désormais à l’œil nu, devinrent le terme générique des microorganismes pathogènes en suspension dans l’air, sans distinction d’espèces de bactéries ou de virus, par contraste avec les poussières microscopiques inoffensives.
Juin 2010
(1) La quinine, préconisée pour le traitement du paludisme, avait été extraite en 1820 de l’écorce du quinquina andin par les pharmaciens-chimistes français Pierre Pelletier (1788-1842) et Joseph Caventou (1795-1877).
(2) T. XXIX (1825), p. 225-240. Vitruve est un architecte romain du Ier siècle avant notre ère.
(3) Jean-Baptiste Boussingault, Mémoires, Paris, Typo Chamerot et Renouard, t. 1, 1892, p. 149. Le rouissage est le traitement par macération de plantes à utilisation textile comme le lin ou le chanvre.
(4) César Famin, Colombie et Guyanes, in L'Univers : histoire et description de tous les peuples, Paris, Firmin- Didot, 1839, p. 22
(5) Claude-Louis Cadet, « Des moyens de reconnaître la présence des miasmes putrides », Bulletin de Pharmacie, t. 2, 1810, p. 60-61.
(6) Claude-Louis Cadet, ibid.